-Hé, réveille-toi !

J'ouvre les yeux au son de cette voix mélodieuse.

Je ne comprends rien.

Où est passée Nina ?

Qui est cette femme ?

 Je frotte mes yeux encore embrouillés et je sens mon ventre gargouiller de plus belle.

Tout me revient alors en mémoire :

la faim qui me tenaille depuis des jours,

l'odeur nauséabonde que je n'arrive pas à enlever,

 la fatigue qui se fait toujours plus pressante,

 et surtout ce besoin de parler à quelqu'un...

 Ce besoin qui m'a fait perdre la tête et qui m'a fait rêver d'une vie où je ne serais pas seule...

 Je regarde la jeune femme qui se tient à mes côtés.

 Encore une hallucination je présume...

Je ne me ferai plus avoir.

 Je l'ignore donc et retourne m'occuper de mes plantations.

-Tu comptes m'ignorer encore longtemps ?

 -Tu n'es qu'une hallucination. Je ne veux pas devenir fou.

 -Une hallucination ? Moi ? Mais tu as pris un coup de soleil ma parole !

 -Je ne te connais pas et je ne sais pas par quel miracle tu es arrivés ici.

 Mais je souffre déjà bien assez en sachant que Nina n'est pas réelle alors...

 -Mais c'est moi Nina !

 -Ha non ne te moque pas de moi !

 Si tu es Nina moi je suis...

 -Tu es quoi au juste ?

 -Oh et puis laisse-moi tranquille !

 -Je ne peux pas faire ça.

 -Et pourquoi donc ?

 -Parce que toi comme moi sommes bloqué sur cette île sans aucun moyen d'en partir...

 -Pourquoi tu ne partirais pas par là où tu es arrivé ?

 Et d'ailleurs tu es arrivé par où ?

 Elle me montre l'arche étrange dont je ne connais pas l'utilité.

-Oh tu me fatigues avec tes mensonges.

Je sais très bien que tu sors de ma tête.

 La solitude me rend fou.

Je vais t'ignorer, peut-être que lorsque tu en auras marre tu t'en iras ?

 -J'en ai déjà plein le dos de toi et pourtant je suis encore là.

 Et puis j'attends toujours que tu me remercies.

 -Et pour quoi je ferai ça ?

 -Je t'ai quand même veillé pendant trois jours !

 -Je ne t'ai rien demandé.

 -Toutes les personnes de ton espèce sont-elles aussi exaspérantes que toi ?

 -Je te signale que tu fais, toi aussi, partie de cette espèce.

 -Non, moi je suis une erreur.

 Me voilà entrain d'avoir une conversation avec mon inconscient.

Je repense à mon frère qui se moquait toujours de mon envie de solitude...

 Je donnerais tout ce qui me reste pour retourner auprès de ma famille...

 Cette fille... Elle est toujours là à me fixer.

 Et si elle était bien réelle ?

 Je dois en avoir le cœur net...

 Je m'approche d'elle l’empêchant de fuir.

 Je lui tiens la main que je sens toute chaude dans la mienne.

 Et je l'embrasse.

 Sa réponse ne se fait pas attendre.

 Elle m'envoie une claque que je ne suis pas prêt d'oublier.

 Mais cette douleur est si intense et si réelle...

 Elle est donc vraiment là ?

 Ce n'est pas une hallucination ?

-Alors tu es vraiment là, avec moi...

 -C'est ce que je me tue à te dire depuis plus de deux heures !

 -Mais comment es-tu arrivé ici ?

 -Je te l'ai déjà dit. Par cette arche.

 Je la regarde incrédule.

Je me suis déjà fait avoir une fois, mais on ne m'y reprendra plus.

La solitude me pèse, je dois bien l'avouer.

Je me suis déjà imaginé une petite amie imaginaire alors je ne retomberais pas dans la folie.

-Tu n'es qu'une hallucination.

Laisse-moi tranquille maintenant.

-Tu ne vas pas remettre ça!

Je pensais pourtant que tu me croyais!

Mais puisque je te dis que je suis bien réelle !

-Tu ne m'auras pas alors sors de ma tête...

 Pour toute réponse, elle me donne une seconde gifle.

 La douleur que je ressens me paraît encore plus réelle que tout à l'heure.

 Je comprends alors qu'elle n'est pas une simple hallucination.

 Trop content, je la regarde un moment, la bouche ouverte, ne sachant pas quoi dire.

-Enfin, tu as compris que je n'étais pas un rêve !

 Sans prévenir, je la serre dans mes bras, enfin soulagé de ne plus être seul.

 Elle me repousse alors énergiquement.

-Mais ça ne va pas ?

 Ne vas pas t'imaginer qu'entre toi et moi il va se passer quelque chose.

 -Non je suis désolé. J'étais simplement heureux.

 -Il va nous falloir nous remettre au travail.

Son ton ne supporte aucune réplique.

 Je lui obéis, admiratif de son autorité.

 Une femme qui sait ce qu'elle veut...

 Je crois bien que c'est ce qu'il me faut.

 Elle est très belle ce qui accentue mon désir pour elle.

 Elle doit ressentir mon regard pesant sur elle alors elle ajoute :

-Ce n'est pas en me regardant ainsi que le travail va aller plus vite.

 Je me joins alors à elle pour entretenir, le potager et pêcher.

 Le temps file à toute allure.

 Cela fait maintenant deux mois que Nina est à mes côtés.

 A force de patience, elle s'est radoucie et nous nous entendons très bien.

 Ce soir est une nuit claire.

 Les rayons de la lune se reflètent sur la surface lisse de la mer.

 Nous sommes tous les deux, blottis l'un contre l'autre, regardant les étoiles dans le ciel.

 Je n'aurais pas pu rêver mieux...

 Mon cœur bat tellement fort lorsque je la regarde.

 Son parfum me rend complètement fou.

 Tout me paraît tellement plus idyllique avec elle près de moi...